Au cœur d’une polémique grandissante, la loi Duplomb pourrait faciliter la multiplication des méga bassines. Entre besoins des agriculteurs confrontés au stress hydrique, interrogations environnementales et diagnostics scientifiques, l’avenir de ces réserves de substitution interroge leur véritable pertinence.
Patrice Riottet est l’un des 350 irrigants du bassin Sarthe aval. Pour cet éleveur laitier, l’irrigation est un outil de production. Son maïs est destiné à nourrir ses bêtes.
Cette année, sans eau, il est quasiment inexploitable. Avec, il limite la casse.
«Dès qu’il y a un écart dans l’alignement des grains, c’est qu’il y a eu un stress», constate-t-il.
Pour Patrice Riottet, éleveur laitier, l’irrigation est un outil de production. Son maïs est destiné à nourrir ses bêtes
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© France 3 Pays de la Loire
Cette assurance, les irrigants estiment la perdre ces dernières années. S’ils utilisent de nouveaux matériels pour économiser l’eau, une réserve de substitution qui stocke l’eau en hiver serait pour eux la solution.
«Autant il y a une dizaine d’années, on n’avait que quelques jours de restrictions sur l’eau, aujourd’hui, avec les nouveaux arrêtés, tout de suite, on est trois mois en restriction», explique Pascal Jousse, président de l’association des irrigants de l’ouest.
On sait que si on ne fait rien aujourd’hui, on aura de moins en moins d’eau disponible en période d’été
Pascal JoussePrésident de l’association des irrigants de l’ouest
Les Pays de la Loire comptent aujourd’hui 25 réserves, toutes construites en Vendée il y a une quinzaine d’années.
En subventionner de nouvelles n’est pas exclu pour l’Agence de l’eau, si leur pertinence est démontrée par des études HMUC (Hydrologie, milieu, usage, climat), un diagnostic des volumes d’eau disponibles pour les différents usages, en prenant en compte les effets du dérèglement climatique.
18 sont actuellement lancés en Pays de la Loire.
«Il y a des endroits où on aura un déficit qui sera trop important, où on n’aura pas la capacité en hiver, par exemple, de remplir ces retenues, explique Morgan Priol, directrice régionale de l’Agence de l’eau. Donc là, dans ce cas, ça ne serait pas pertinent. On sait qu’il y a des questions de taille aussi et d’usage.
This is why we have implemented this initial framework of conducting detailed diagnostic studies and territorial projects to ensure that it is relevant to the proposed location.»
Are all mega reservoirs relevant?
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One tool among others for the Water Agency, provided there is collective management of the resource and a territorial project that also includes the restoration of watercourses, as here where this stream has been reshaped to function better.
«We have reduced it a little, allowing it to overflow in winter. As a result, it will limit downstream flooding because the stream, when overflowing, will be able to expand, explains Raphaëlle Henner, river technician at the Vègre Deux-Fonts-Géee mixed syndicate. Its energy will be dissipated, so floods will be less sudden. And the water will be able to seep slowly into the ground, recharge the aquifers, and be distributed during low-water periods, especially in summer when needed.»
This stream has been reshaped to function better
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Despite these diagnostics, the France Nature Environnement association remains skeptical.
For them, water storage provides false security to farmers, for whom emergency measures will become a means of production in summer.
«If the resource is absent at that time, if they cannot resort to it, it will be catastrophic, laments Jean-Christophe Gavalet, president of FNE Sarthe. Whereas a shift towards something more economical, with plants that can better withstand water stress, would allow for a more interesting crop adaptation strategy than these heavy investments.»
Each project will take several years to materialize, a process that could be accelerated with the Duplomb law, which presumes them to be of major public interest.
With Cathy Colin
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L’avenir de ces réserves de substitution est remis en question, entre les besoins des agriculteurs confrontés au stress hydrique, les interrogations environnementales et les diagnostics scientifiques, leur pertinence réelle est mise en doute. C’est pourquoi nous avons mis en place ce cadre initial consistant à mener des études fines de diagnostic et à élaborer des projets de territoire pour garantir la pertinence des initiatives proposées à chaque endroit.
Les méga bassines sont-elles toutes pertinentes ?
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Un outil parmi d’autres pour l’Agence de l’eau, à condition d’une gestion collective de la ressource et d’un projet de territoire qui compte aussi la restauration des cours d’eau, comme ici où ce ruisseau a été remodelé pour mieux fonctionner.
«On l’a réduit un petit peu, on lui permet de déborder l’hiver. Du coup, ça va limiter les inondations en aval parce que le cours d’eau, en débordant, va pouvoir s’étendre, raconte Raphaëlle Henner, technicienne rivière syndicat mixte Vègre Deux-Fonts-Géee. Son énergie va être dissipée, donc les crues vont être moins soudaines. Et l’eau va pouvoir s’infiltrer tranquillement dans le sol et recharger les nappes et être distribuée en période d’étiage, l’été notamment, quand on en a besoin».
Ce ruisseau a été remodelé pour mieux fonctionner
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Malgré ces diagnostics, l’association France Nature Environnement reste sceptique.
Pour elle, le stockage de l’eau apporte une fausse sécurité aux agriculteurs pour qui le secours deviendra moyen de production en été.
«Si la ressource, à ce moment-là, est absente, qu’ils ne peuvent pas y avoir recours, ça sera catastrophique, déplore Jean-Christophe Gavalet, président FNE Sarthe. Alors que l’orientation vers quelque chose de plus économe, des plantes qui supporteraient mieux le stress hydrique, permettrait d’avoir une stratégie d’adaptation en termes de culture plus intéressante que ces lourds investissements».
Chaque projet mettra plusieurs années à voir le jour, une construction qui pourrait être accélérée avec la loi Duplomb qui les présume d’intérêt général majeur.
Avec Cathy Colin
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