Capture de cocaïne en Normandie : Qu’est-ce que le drop-off, méthode des narcotrafiquants?

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Jamais les autorités françaises n’avaient intercepté un drop-off en pleine mer. Ce mode opératoire, «caractéristique des groupes criminels organisés les plus aguerris«, selon Frédéric Teillet, procureur de la République de Rennes, se traduisait jusqu’alors par des échouages massifs sur les plages de Normandie.

Mais pour la toute première fois, dans la nuit du 3 au 4 avril, 800 kg de cocaïne ont été saisis dans le cadre de l’interception d’une livraison de drogue par drop-off (soit l’action de déposer, en français). Cette méthode consiste, pour les narcotrafiquants, à larguer des ballots de drogue en mer pour que des bateaux de pêches plus petits, les acheminent vers des ports locaux.

En l’occurrence, l’équipage d’un cargo en provenance du Brésil a été interpellé par les autorités françaises. Il est soupçonné d’avoir transporté des stupéfiants à proximité des côtes normandes.

«Les ballots étaient parfois retrouvés par des particuliers ou les forces de l’ordre sur les côtes normandes ou britanniques. Cette fois, nous avons pu caractériser le phénomène à travers une enquête et le flagrant délit. C’est ce qui fait le caractère exceptionnel de ce dossier«, explique Sébastien Tiran, directeur du service du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), au terme de dix-huit mois d’enquête.

La pêche est un secteur en crise, avec des personnes à faibles revenus. N’importe qui peut s’improviser trafiquant de drogue.

Ruddy Sergeant, délégué départemental de l’unité de police du Calvados

Au Havre, à Tancarville et à Ouistreham, huit complices présumés ont été interpellés, dont six hommes et deux femmes. Parmi eux, trois sont marins pêcheurs. «Il y a une désertification des grandes villes pour les petites communes, peut-être moins surveillées par les forces de l’ordre. N’importe qui peut s’improviser trafiquant de drogue», fait valoir Ruddy Sergeant, délégué départemental de l’unité de police du Calvados.

Les marées blanches qui déferlent en Normandie ces dernières années concerneraient désormais plus concrètement des marins-pêcheurs locaux. À Ouistreham, samedi 5 avril, un bateau amarré dans le port et visible des passants a été placé sous scellé pour les besoins de l’enquête.

«Apprendre qu’un jeune pêcheur de la ville puisse avoir participé à un trafic local, et qui trouve ses origines à l’international, nous laisse sans voix. Ce n’est pas nouveau au Havre mais nous sommes surpris que le narcotrafic puisse s’étendre à Ouistreham», témoigne Romain Bail, maire de la commune où au moins un pêcheur a été interpellée.

En septembre 2024 déjà, plusieurs ballots, contenant chacun une cinquantaine de kilos de cocaïne, ont été retrouvés échoués sur les plages de Courseulles-sur-mer et de Graye-sur-mer (Calvados) ou encore à Quinéville ou sur la plage des Gougins, à Saint-Marcouf (Manche). L’année précédente, entre février et mars 2023, plus de deux tonnes de cocaïne ont été récupérées sur le littoral du Cotentin.

Les eaux normandes, sur la route de la cocaïne vers l’Europe, sont plus que jamais sous la surveillance des autorités.