Les précieuses œuvres d’art ont été décrochées et mises à l’abri dans une cave inondée pour les préserver de la chaleur et des fumées toxiques. Une fois l’incendie maîtrisé, les toiles ont été exfiltrées discrètement, cachées dans une voiture, jusqu’à trouver refuge au musée Condé de Chantilly. Ces œuvres miraculeusement sauvées des flammes sont désormais exposées au public, témoignant de la passion et de la détermination du collectionneur à préserver le patrimoine artistique de Watteau. Des œuvres de Watteau sauvées des incendies de Los Angeles exposées à Chantilly

Le musée Condé expose à partir de samedi une cinquantaine d’œuvres du peintre des fêtes galantes, dont celles d’un collectionneur qui a sauvé ses toiles des flammes, en janvier dernier, à Los Angeles.





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Une peinture de Watteau appartenant au collectionneur Lionel Sauvage, sauvée des flammes lors des incendies de janvier 2025 à Los Angeles, est installée au musée Condé du château de Chantilly, le 27 février 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)
Une peinture de Watteau appartenant au collectionneur Lionel Sauvage, sauvée des flammes lors des incendies de janvier 2025 à Los Angeles, est installée au musée Condé du château de Chantilly, le 27 février 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)

Décrochées du mur d’une villa menacée par les incendies de Los Angeles, abritées dans une cave puis exfiltrées en catimini, plusieurs œuvres miraculées du peintre Antoine Watteau (1684-1721) sont exposées à partir du samedi 8 mars et jusqu’au 15 juin 2025 au château de Chantilly (Oise).

Quand Lionel Sauvage pose son regard sur le tableau La Diseuse d’aventure lors du montage de l’exposition, le soulagement se lit sur le visage de ce collectionneur franco-américain, qui n’avait plus vu l’œuvre depuis qu’elle avait quitté Los Angeles en proie aux flammes. Ce passionné de Watteau possède aujourd’hui cinq tableaux et une quinzaine de dessins.

La Diseuse d’aventure a été sauvée deux fois. Une première fois en 2012 quand le collectionneur, qui venait de l’acquérir, l’a fait authentifier, alors qu’une copie exposée dans un musée de San Francisco était présentée comme l’original. Le deuxième sauvetage est survenu en janvier, quand un méga-feu ravageait Pacific Palisades, quartier huppé de Los Angeles où habite Lionel Sauvage, ancien haut responsable d’une grande société américaine de gestion d’actifs.

Ses tableaux de Watteau sont alors «la première chose» à laquelle il pense.

Avec l’aide de son jardinier John Denuccio, ils ont descendu les œuvres dans une cave hermétique, puis ont protégé la villa des flammes pendant 12 heures en utilisant une pompe reliée à l’eau de la piscine. John Denuccio raconte depuis Los Angeles : «On est revenus le lendemain et la maison était toujours en place, les œuvres étaient là (…) mais il n’y avait pas de ventilation, pas de contrôle de température, de l’humidité.»

Pour évacuer les œuvres du quartier, évacué et bouclé par la garde nationale, les deux hommes ont loué une camionnette et sont partis à trois heures du matin, pendant que «les militaires dorment dans leur camion», selon les dires de Lionel Sauvage. Les œuvres ont ensuite été envoyées en France, où plusieurs d’entre elles ont rejoint l’exposition «Les Mondes de Watteau» prévue au musée Condé du château de Chantilly au printemps 2025.

Les œuvres de Lionel Sauvage sont d’autant plus précieuses qu’elles «ont très rarement été exposées» voire, pour certaines, jamais, souligne Axel Moulinier, co-commissaire de l’exposition. Watteau, qui n’a pas fait l’objet d’une grande rétrospective depuis 1984, a été «une sensation immédiate» de son vivant, souligne Baptiste Roelly, co-commissaire de l’exposition.

«Watteau incarne un moment charnière dans l’histoire de France», ajoute Axel Moulinier. «C’est la fin du règne de Louis XIV, la France est exsangue financièrement, un peu moralement aussi» et le peintre innove en créant le genre des fêtes galantes, qui permettent aux spectateurs de s’évader en représentant les fêtes organisées en plein air par l’aristocratie de l’époque.

L’exposition est le fruit d’une collaboration entre les œuvres du musée Condé de Chantilly et celles de Lionel Sauvage, qui possède «sans doute la plus grosse collection [privée], en matière de Watteau, qui existe aujourd’hui», estime Baptiste Roelly. Le musée Condé a obtenu d’autres prêts pour son exposition, réunissant une cinquantaine d’œuvres du peintre.

«Si un malheur était advenu, ça aurait été une perte pour l’histoire de ce grand maître (…) qui a révolutionné, en quelque sorte, le cours de la peinture», souligne Mathieu Deldicque, directeur du musée Condé. «Dieu merci, j’étais là et j’ai pu les protéger», se réjouit Lionel Sauvage. «Les œuvres sont intactes. Elles n’ont pas souffert.» Elles auront une longue vie.»

Le musée Condé expose à partir de samedi une cinquantaine d’œuvres du peintre des fêtes galantes, dont celles d’un collectionneur qui a sauvé ses toiles des flammes, en janvier dernier, à Los Angeles.





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Une peinture de Watteau appartenant au collectionneur Lionel Sauvage, sauvée des flammes lors des incendies de janvier 2025 à Los Angeles, est installée au musée Condé du château de Chantilly, le 27 février 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)
Une peinture de Watteau appartenant au collectionneur Lionel Sauvage, sauvée des flammes lors des incendies de janvier 2025 à Los Angeles, est installée au musée Condé du château de Chantilly, le 27 février 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)

Décrochées du mur d’une villa menacée par les incendies de Los Angeles, abritées dans une cave puis exfiltrées en catimini, plusieurs œuvres miraculées du peintre Antoine Watteau (1684-1721) sont exposées à partir du samedi 8 mars et jusqu’au 15 juin 2025 au château de Chantilly (Oise).

Quand Lionel Sauvage pose son regard sur le tableau La Diseuse d’aventure lors du montage de l’exposition, le soulagement se lit sur le visage de ce collectionneur franco-américain, qui n’avait plus vu l’œuvre depuis qu’elle avait quitté Los Angeles en proie aux flammes. Ce passionné de Watteau possède aujourd’hui cinq tableaux et une quinzaine de dessins.

La Diseuse d’aventure a été sauvée deux fois. Une première fois en 2012 quand le collectionneur, qui venait de l’acquérir, l’a fait authentifier, alors qu’une copie exposée dans un musée de San Francisco était présentée comme l’original.

The second rescue occurred in January, when a mega-fire ravaged Pacific Palisades, an upscale neighborhood in Los Angeles where Lionel Sauvage, a former high-ranking executive of a major American asset management company, lives.

His Watteau paintings are the first thing he thinks of. With his gardener John Denuccio, they bring the artworks down to a sealed basement, then protect the villa from the flames for 12 hours using a pump connected to the pool water.

«We came back the next day and the house was still standing, the artworks were there (…) but there was no ventilation, no temperature control, no humidity,» recounts John Denuccio from Los Angeles.

To evacuate the artworks from the neighborhood, evacuated and sealed off by the National Guard, the two men rent a van and leave at three in the morning, while «the soldiers sleep in their truck,» says Lionel Sauvage. The artworks later fly to France, where several of them have joined the Condé Museum at the Chantilly Castle for its exhibition «The Worlds of Watteau» scheduled for spring 2025.

The artworks owned by Lionel Sauvage are even more precious as they «have rarely been exhibited» or, for some, never, emphasizes Axel Moulinier, co-curator of the exhibition. While Watteau has not been the subject of a major retrospective since 1984, he was «an immediate sensation» in his lifetime, says Baptiste Roelly, co-curator of the exhibition.

«Watteau embodies a pivotal moment in French history,» adds Axel Moulinier. «It is the end of the reign of Louis XIV, France is financially exhausted, a bit morally as well,» and the painter innovates by creating the genre of the fêtes galantes, which, by depicting the outdoor parties organized by the aristocracy of the time, allow spectators to escape.

The exhibition «was born out of a meeting» between the artworks of the Condé Museum at Chantilly and those of Lionel Sauvage, «arguably the largest [private] collection of Watteau, in existence today,» estimates Baptiste Roelly. The Condé Museum, which owns four paintings and six drawings by Watteau, has also obtained other loans for its exhibition, bringing together around fifty works by the painter.

«If a misfortune had occurred, it would have been a loss for the history of this great master (…) who revolutionized, in a way, the course of painting,» emphasizes Mathieu Deldicque, director of the Condé Museum. «Thankfully, I was there and I was able to protect them,» rejoices Lionel Sauvage. «The artworks are intact. They have not suffered. They will have a long life.»

Le musée Condé expose à partir de samedi une cinquantaine d’œuvres du peintre des fêtes galantes, dont celles d’un collectionneur qui a sauvé ses toiles des flammes, en janvier dernier, à Los Angeles.

Avec son jardinier John Denuccio, ils ont descendu les œuvres dans une cave hermétique, puis ont protégé la villa des flammes pendant 12 heures en utilisant une pompe reliée à l’eau de la piscine.

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